Unilend
Nous avons appris, avec consternation, la faillite de la société UNILEND, pionner du crowdlending en France. La SAS SFFPME (SOCIETE FRANCAISE POUR LE FINANCEMENT DES PME) propriétaire de la marque avait été créé le 25 janvier 2013. Sa dernière augmentation de capital l’avait porté à 555.535 € et son activité était : « l’Exploitation de sites Internet et d’outils de communication relatifs à la finance participative, intermédiaire en financement participatif, conseiller en investissements participatifs et de manière générale, la promotion et le développement des activités de finance participative. La société avait le statut d’intermédiaire en financement participatif (IFP) et de conseiller en investissements participatifs (CIF) et intervenait exclusivement dans le financement des PME.
La structure a bénéficié de trois tours de table important, qui lui ont permis de lever 8 un total de 11,5 M€ et comptait notamment « Bpifrance, Ventech, 360 Capital Partners et New Alpha AM parmi ses actionnaires. » Insuffisant pour faire face à ses charges structurelles, son besoin de trésorerie et lutter contre une concurrence importante.
Bilan entre le lancement de son activité ennovembre 2013 et sa faillite en septembre 2018, soit 5 ans d’activité : « 43 849 prêteurs « inscrits », pour 15 277 prêteurs « actifs », dont « 98% de particuliers ». 33 millions d’euros prêtés aux entreprises, dont 7 millions en 2017 et 3,5 millions d’euros en 2018. 21 millions d’euros remboursés à ce jour. 7,85% : le taux de capital en défaut ou en retard de remboursement depuis le lancement (2,6 millions d’euros de capital « en défaut »), 3,13% pour les prêts de l’année 2016 et 2,99% pour ceux de 2017. Taux de rendement interne (performance des investissements en incluant les défauts) : 3,34%.»[1]
La société comptait plus de 15.200 prêteurs actifs sur sa plate-forme internet. Elle gérait un encours de près 12 millions d’euros (M€) de capital à rembourser et près d’un million d’intérêt.
La situation s’est détériorée très rapidement. La société s’est déclaré en cessation de paiement en septembre 2018 et mis en liquidation judiciaire moins d’un mois plus tard (le 17 octobre), faute de pouvoir se relancer où d’une reprise. Une vingtaine de personne ont perdu leur travail.
La plateforme ne proposait que des prêts au PME (principalement en activité et en développement), en concurrence frontale avec le secteur bancaire, premier partenaire de sa cible. Son directeur expliquera la fin de son entreprise en ses termes : « Quand nous avons créé Unilend en 2013, il y avait un besoin en financement de la part des PME », raconte Nicolas Lesur. « Les banques prêtaient alors difficilement, ou réclament d’importantes garanties. Nous proposions alors aux PME un prêt plus cher mais simple et rapide. Le marché a évolué avec la conjoncture de taux bas, le QE [politique de rachat massif d’actifs, NDLR] et les baisses de taux directeurs de la Banque centrale européenne. Les banques cherchent désormais à prêter un maximum aux entreprises, à des taux faibles. »
Deux ans plus tard, la nouvelle politique de la banque centrale européenne (BCE) a permis l’injection de milliards dans le circuit bancaire et dans le financement des entreprises, avec des taux de 4 à 5 points de moins que la plateforme. Une entreprise saine avait tout intérêt à recourir à un prêt bancaire, sauf à se financer sans garantie, ni caution personnelle. « La plateforme s’adresse aux entreprises ayant au moins 3 exercices comptables clos qui souhaitent emprunter de 20 000 à 250 000 € sur 24 à 60 mois. »[2] Dans ce cas, les frais financiers étant à la charge de l’entreprise et déductible du résultat fiscal, le dirigeant avait un intérêt supérieur qu’avec la prêt classique.
[…] « Malheureusement, c’est un constat d’échec concernant le marché du crowdlending », conclut Nicolas Lesur. Un message pessimiste, qui laisse entendre qu’il y aura encore de la « casse » parmi la petite vingtaine de plateformes spécialisées dans le prêt aux PME. »[3]
Il reste 12 millions d’euros a recouvrir par la SFPMEI, dans le cadre de la clause de continuité. « La SFPMEI[4] va prendre en charge le recouvrement et les remboursements selon les mêmes modalités qu’Unilend. […] L’association professionnelle Financement Participatif France (FPF) a rappelé que « toutes les plateformes [intermédiaires en financement participatif, ou IFP, NDLR] ont obligatoirement un plan de gestion extinctive prévu par les textes », en renvoyant vers la recommandation du régulateur bancaire, l’ACPR, publiée en décembre 2017 sur le sujet. Ainsi, lorsqu’une plateforme de crowdlending ayant le statut IFP, comme Unilend, cesse son activité, « il n’y a pas de flux financiers gérés en direct par les plateformes : les flux passent par des prestataires de service de paiement (PSP)[5] », en l’occurrence la SFPMEI dans le cas d’Unilend. « Donc les prêts, pour ce qui concerne les plateformes de prêts, continuent et sont gérés par le partenaire désigné, si une plateforme cesse son activité », ajoute l’association FPF. » [6]
Dans un communiqué, Unilend écrit à ses membres, « avoir confié à la SFPMEI le soin de gérer vos prêts et vos opérations jusqu’au terme de votre dernier prêt en cours :
La SFPMEI gère depuis toujours vos opérations et s’assure de la protection de vos fonds sous l’autorité de l’ACPR.
Elle gèrera désormais, à partir du système d’information développé par Unilend, les opérations de remboursement, organisera le recouvrement si nécessaire, se chargera des déclarations des encours et des incidents auprès du fichier central des entreprises de la Banque de France et éditera chaque année les documents fiscaux.
Aucun nouveau projet ne sera présenté.
L’argent disponible sur votre compte Unilend pourra continuer d’être retiré d’un simple clic.
Vous ne pourrez plus alimenter votre compte Unilend.
Toutes vos opérations et tous vos documents continueront à être accessibles dans votre espace prêteur. »
Sécurisation des fonds :
« Que risquent les épargnants qui ont investi via Unilend ? Pour Stéphanie Savel, présidente de l’association Financement Participatif France, les particuliers ne doivent pas s’inquiéter. « Il est important de rappeler que toutes les plates-formes ont obligatoirement un plan de gestion extinctive prévu par les textes », rassure-t-elle.
« De plus, il n’y a pas de flux financiers gérés en direct par les plates-formes, ajoute Stéphanie Savel. Les flux passent par des prestataires de services de paiement. Donc les prêts, pour ce qui concerne les plates-formes de prêts, continuent et sont gérés par le partenaire désigné. Ainsi, les prêteurs ne seront en aucune manière lésés, si une plate-forme cesse son activité », affirme-t-elle. »[7]
Avant UNILEND, le petit monde de la finance participatif avait connu d’autres défaillances.
Après la cessation d’UNILEND, Patrick Setzekorn a interwiewé le responsable de la SFPMEI. C’est à cet organisme « qu’incombe “la gestion extinctive de la plateforme” »
« la SFPMEI propose actuellement 2 grandes typologies de services financiers :
l’émission et la gestion de monnaie électronique ;
la fourniture de services de paiement du type gestion de compte de paiement, gestion des flux associés, ou encore acquisition d’ordres de paiement.
C’est notamment dans ce cadre que la SFPMEI a développé son offre depuis plusieurs années à destination de nouvelles sociétés innovantes afin de les accompagner dans le développement de services financiers sur internet (crowdlending, P2P, etc.). Dans ce cadre, la SFPMEI a notamment pour rôle de gérer et de sécuriser les fonds des utilisateurs de ces services.
[…]A&$ : En quoi consiste “une gestion extinctive”? Cette procédure est t’elle imposée par la loi où est-ce que cela fait simplement parti du process qualité signé entre SFPMEI et votre client UNILEND ?
SFPMEI : Dans le cadre de l’activité de financement participatif, le rôle de l’intermédiaire en financement participatif (IFP) est de mettre en relation des porteurs de projets avec des personnes qui leur prêtent de l’argent. Pour cela, via la plateforme internet, il met à leur disposition un contrat de prêt type et un système de gestion des flux financiers.
La gestion extinctive a pour objectif principal d’organiser la poursuite des opérations de financement jusqu’à leur terme, dans le cas où l’IFP cesserait son activité.
[…] A&$ : Avez-vous une vision de la durée de cette gestion extinctive ? Des projets de 60 mois ont été signés juste avant la cessation d’activité d’UNILEND. Faudra t’il assurer cette gestion pendant 5, 6 7 ans ? SFPMEI : Comme vous l’indiquez, certains projets financés en 2018 ont des durées restantes d’environ 5 ans. Donc, en l’état des lieux, la SFPMEI assurera un suivi et une gestion du portefeuille de projets jusqu’à leur terme. Evidemment, cette durée pourra être écourtée notamment en cas de remboursement anticipé par des emprunteurs. »
Enfin et c’est important : « Le dispositif de gestion extinctive et la continuité des services n’entraînent aucun coût supplémentaire pour les utilisateurs de la plateforme. »[8]
[1] https://www.cbanque.com/actu/70254/crowdlending-unilend-jette-eponge#LlWv1tuDjcqmof4K.99
[2] http://www.crowdfunding-crowdlending-crowdequity.com/unilend/
[3] Le pionnier du « crowdfunding » Unilend met la clé sous la porte », par Solenn Poullennec, 19/10/2018 – https://www.lesechos.fr/finance-marches/banque-assurances/0302434660347-le-pionnier-du-crowdfunding-unilend-met-la-cle-sous-la-porte-2215102.php
[4]« Société financière du porte-monnaie électronique interbancaire (SFPMEI), prestataire de services de paiement (PSP) déjà partenaire d’Unilend. (https://www.cbanque.com/actu/70254/crowdlending-unilend-jette-eponge#LlWv1tuDjcqmof4K.99)
[5] Se reporter à la page XX
[6] https://www.cbanque.com/actu/70254/crowdlending-unilend-jette-eponge#LlWv1tuDjcqmof4K.99
[7] https://www.lesechos.fr/finance-marches/banque-assurances/0302434634529-crowdfunding-les-epargnants-vont-ils-recuperer-leur-argent-2214836.php
[8] « Gestion Exctinctive d’UNILEND : La SFPMEI prête à assurer ses responsabilités, par Patrick Setzekorn , 12 novembre 2018 – https://argent-et-salaire.com/unilend-gestion-exctictive-sfpmei/